ChatGPT « empoisonne-t-il » votre cerveau ?

ChatGPT « empoisonne-t-il » votre cerveau ?​

La généralisation des intelligences artificielles génératives (ChatGPT et consorts) suscite débats et craintes quant à leurs effets cognitifs. 

D’un côté, ces outils promettent gain de temps et personnalisation de l’apprentissage ; de l’autre, experts et études alertent sur des risques potentiels pour la mémoire, l’attention, la créativité et l’autonomie intellectuelle. 

Dans ce dossier, nous examinons les conséquences possibles d’un usage intensif de ChatGPT (et IA similaires) sur nos fonctions mentales. 

Nous nous appuyons sur des sources universitaires et universitaires francophones et internationales – rapports, revues scientifiques et analyses reconnues – pour éclairer l’impact sur la mémoire, la concentration, la pensée critique, la créativité, la dépendance cognitive, ainsi que l’évolution des méthodes d’apprentissage et de travail. 

Nous évoquerons enfin les avis de chercheurs (neurosciences, sciences cognitives, pédagogie, psychologie) et les nuances apportées par certains travaux récents.

Mémorisation et rétention d’information

Plusieurs études pointent du doigt un effet d’« externalisation cognitive ». L’idée générale est que recourir fréquemment à ChatGPT pour chercher des réponses ou rédiger du contenu peut alléger la charge mentale immédiate au prix d’un moindre entraînement de la mémoire. Par exemple, Jose et al. (2025) notent qu’un usage excessif de l’IA « améliore certes l’apprentissage personnalisé, mais une dépendance excessive pourrait réduire l’engagement cognitif et la rétention à long terme »pmc.ncbi.nlm.nih.gov. Dans un même ordre d’idée, Bai et al. (2023) observent que l’exposition prolongée à ChatGPT conduit à un déclin de la mémoire chez les étudiants comparée à un groupe témoinpmc.ncbi.nlm.nih.gov. Autrement dit, la disponibilité permanente d’une réponse immédiate incite l’utilisateur à moins mobiliser activement sa mémoire, renforçant le phénomène parfois appelé « effet Google » ou « amnésie numérique »pmc.ncbi.nlm.nih.govmikiane.com.

La philosophe Anne Alombert (Paris 8) souligne l’importance de ce mécanisme : pour elle, déléguer l’écriture ou la recherche à ChatGPT, c’est « ne plus s’entraîner » à ces activités cognitives, un véritable « court-circuit de nos capacités de mémorisation, de réflexion, d’interprétation, de rédaction »socialter.fr. Elle rappelle en effet que « écrire, c’est aussi penser » – l’acte d’écrire mobilisant la mémoire, le raisonnement argumentatif et d’autres fonctions intellectuellessocialter.fr. De fait, des chercheurs en éducation relèvent qu’un usage excessif d’IA peut renforcer la « paresse mentale » et affaiblir la mémoire de travail des étudiantseducationaltechnologyjournal.springeropen.compmc.ncbi.nlm.nih.gov.

Pour nuancer, certains s’interrogent toutefois sur la réalité de ces effets. L’Agence Science-Presse (Québec) rappelle qu’à ce jour l’idée d’une « amnésie numérique » induite par la technologie reste largement non démontréesciencepresse.qc.ca. Comme le souligne un article de vérification, les premières allégations provenaient de firmes cherchant à promouvoir des produits (ex. Kaspersky) et n’ont pas été reproduites de façon robustesciencepresse.qc.ca. En d’autres termes, la communauté scientifique n’a pas établi de manière incontestable que notre mémoire s’atrophie mécaniquement parce qu’on utilise un smartphone ou ChatGPT. Il reste donc difficile de démêler l’impact réel de l’IA générative de celui de l’usage plus général des écrans et d’Internet (sur lesquels les études de Desmurget et al. ont d’ailleurs depuis longtemps tiré la sonnette d’alarme, estimant qu’ils peuvent contribuer à produire des « crétins digitaux »senat.fr).

Vigilance et attention

En matière d’attention soutenue, l’IA conversationnelle pose aussi question. L’abondance d’informations générées instantanément par l’outil peut fragmenter le temps de concentration et réduire l’effort cognitif. Le rapport du Sénat français (2024) s’inquiète du fait que les technologies numériques, IA et écrans confondus, « contribuent à une dissolution durable de nos capacités à nous souvenir, à nous concentrer et à traiter l’information »senat.fr. L’un des concepts populaires évoqués est celui de la « civilisation des poissons rouges » (Bruno Patino) : la durée d’attention humaine, jadis mesurée en dizaines de minutes, serait ramenée à quelques secondes – équivalent à celle d’un poisson rouge – sous l’effet de nos écrans et IA omniprésentssenat.fr.

Comme le note Michel Lévy-Provençal, philosophe des médias, l’irruption de l’IA générative en 2022-2023 s’ajoute à ce lent « décrochage cognitif » amorcé depuis l’ère télévisuelle et internet. Il craint qu’un « individu hyper-connecté », habitué à voir l’IA combler la moindre pause mentale, ait « de grandes difficultés à se concentrer de lui-même ou à réfléchir sans assistance »mikiane.com. En somme, se reposer en permanence sur un assistant cognitif pourrait contribuer à une forme de dépendance liée à l’attention et à l’effort mentalmikiane.com.

Cela étant, certains soulignent aussi que ChatGPT peut, dans certains usages encadrés, libérer l’attention de tâches fastidieuses pour la rediriger vers des activités à plus forte valeur ajoutée. Du point de vue de la Cognitive Load Theory, bien conçue, l’IA peut réduire la charge cognitive superflue (par exemple, éliminer des recherches documentaires répétitives) et permettre à l’élève de se concentrer sur les opérations cognitives essentiellespmc.ncbi.nlm.nih.gov. Mais les mêmes travaux insistent : la balance est précaire ; un recours abusif à l’outil réduit la « charge germinale » nécessaire à l’apprentissage profondpmc.ncbi.nlm.nih.gov. Autrement dit, l’IA peut aider l’attention en retirant du travail de surface, mais risque de l’affaiblir si elle remplace systématiquement la réflexion approfondiepmc.ncbi.nlm.nih.gov.

Pensée critique et autonomie intellectuelle

Un autre angle d’alerte est la critique de la pensée et l’autonomie dans le raisonnement. Plusieurs spécialistes craignent que ChatGPT n’amène l’utilisateur à fonctionner en mode passif : le chatbot donne une réponse toute faite, donc on s’abstient de vérifier ou d’interroger les sources. Par exemple, Ododo et al. (2024) ont montré que des étudiants utilisant intensivement l’IA tendent à « accepter passivement l’information fournie par l’IA sans examen critique »pmc.ncbi.nlm.nih.gov. Cette « soumission passive » à la machine est précisément ce que redoute la plupart des pédagogues : on perd l’habitude de remettre en question et de raisonner par soi-même.

Cette observation rejoint celle de Lee et al. (2025, étude Lee* et coll.*, résumé par l’UQAM) : les professionnels qui font grande confiance à l’IA posent moins de questions aux résultats généréscollimateur.uqam.ca. À l’inverse, ceux qui s’appuient davantage sur leur propre jugement humanisé font davantage d’effort pour vérifier et adapter les réponses de l’IAcollimateur.uqam.ca. En clair, une confiance excessive envers ChatGPT peut réduire l’exercice de la pensée critiquecollimateur.uqam.ca.

L’effet pervers est décrit par la notion de « désengagement cognitif » ou « atrophie cognitive ». Par exemple, les auteurs de l’étude de Lee et al. notent que la facilité offerte par l’outil réduit la motivation à pratiquer soi-même l’analyse ou l’évaluationcollimateur.uqam.ca. Tout comme on muscle ses biceps en faisant des pompes, on muscle son esprit en réfléchissant activement ; déléguer en permanence ce travail peut le ramollir. Sur ce point, des psychologues comportementaux du Bournemouth University mettent en garde : ChatGPT, en fournissant des réponses instantanées et un ton de conversation rassurant, peut créer un sentiment de familiarité favorisant la dépendancebournemouth.ac.uk. À terme, cette dépendance peut s’accompagner « de l’isolement social, de compétences interpersonnelles diminuées » et, clin d’œil à Tisseron, de « troubles de concentration » similaires à ceux observés dans l’addiction aux écrans ou au smartphonebournemouth.ac.ukmikiane.com. Plus directement, ces chercheurs estiment que s’appuyer sans recul sur les solutions « toutes faites » augmente la tentation de bâcler sa réflexion. Leur étude souligne que ChatGPT fournit certes gratification instantanée et analyse rapide, mais **au prix d’une érosion possible de l’esprit critique **bournemouth.ac.uk. En résumé, si l’IA peut initialement faciliter le travail intellectuel, les experts rappellent qu’elle doit idéalement être utilisée comme un « outil » de stimulation plutôt que comme un substitut de la pensée.

Créativité et « idées neuves »

Le rapport de force est ambiguie sur la créativité. D’un côté, ChatGPT est capable de générer rapidement des idées et du contenu diversifiés, ce qui peut enrichir le processus créatif. Une étude (Doshi & Hauser, 2023) observe que lorsqu’on intègre des suggestions générées par une IA dans un exercice d’écriture, les histoires produites sont jugées plus créatives et agréables – notamment par des auteurs moins créatifs au départpapers.ssrn.com. En ce sens, l’IA pourrait servir de « booster » d’imagination en fournissant une base d’idées ou en combinant différents concepts. L’article de Nature Communications cité plus haut (meta-analyse, 2025) note d’ailleurs des effets modérément positifs sur la « pensée de niveau supérieur » (higher-order thinking), qui inclut en partie la créativité, chez les apprenants utilisant ChatGPTnature.com.

Mais, d’autre part, de réels risques sont pointés. D’abord, l’usage de l’outil peut réduire l’exercice pratique de la créativité personnelle. Selon Alombert, se décharger de la tâche d’inventer (« brainstormer ») ou de rédiger, c’est renoncer à s’entraîner à générer ses propres idées, ce qui affaiblit au fil du temps ces compétences. Une enquête sur l’impact de l’IA sur la pensée critique souligne que les usagers passent « moins de temps à générer des idées originales et plus de temps à évaluer et à adapter les résultats de l’IA »collimateur.uqam.ca. Autrement dit, la créativité n’est pas tant éliminée qu’elle est déplacée : on sous-traite la production brute et on passe plus de temps à peaufiner ou à personnaliser la sortie de l’IAcollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca.

De plus, certaines recherches font apparaître des « effets négatifs » sur la créativité perçue. Habib et al. (2024) ont montré que, si les étudiants aidés par ChatGPT généraient en moyenne plus d’idées (flexibilité) et plus développées, cette facilitation s’accompagnait d’une fixation cognitive sur les suggestions de l’IA et d’une baisse de leur confiance créativepmc.ncbi.nlm.nih.gov. De même, une étude par questionnaire (Habib et al., parue dans le Journal of Creativity, 2024) note que « malgré le potentiel positif, il existe aussi des effets négatifs sur la créativité et la confiance créative »doaj.org. On peut résumer ceci ainsi : ChatGPT peut aider à explorer des pistes nouvelles, mais dépendre exclusivement de ses réponses finit par limiter le sentiment d’initiative propre. Les idées générées par l’IA, en étant partagées par des millions d’utilisateurs, tendent aussi à se ressembler davantage. Doshi & Hauser (2023) constataient ainsi que les récits co-créés avec l’IA étaient jugés meilleurs mais beaucoup plus homogènes les uns par rapport aux autrespapers.ssrn.com.

Enfin, l’impact sur la créativité dépend évidemment de l’usage qu’on fait de l’outil. Des praticiens du design ou de l’éducation notent que ChatGPT peut servir de « boîte à idées » pour le brainstorming, à condition que l’utilisateur conserve un œil critique sur chaque suggestioncollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca. L’art du « prompt engineering » (formulation de bonnes requêtes) devient alors lui-même un exercice cognitif qui nécessite créativité et rigueurcollimateur.uqam.ca. De fait, la Collimateur UQAM rappelle que, plutôt que d’être une panacée, l’IA déplace le travail créatif du domaine de la genèse d’idées vers celui de la supervision, de la reformulation et de la vérificationcollimateur.uqam.ca. Ainsi, un utilisateur entraîné peut garder sa créativité intacte en s’en servant comme d’un assistant agile, tandis qu’un utilisateur peu conscient du phénomène pourrait subir un émoussement de son imagination personnelle.

Dépendance cognitive et « addiction »

Au cœur de ces débats se trouve la notion de dépendance. On évoque tantôt une dépendance technologique (assurer un flux continu d’informations), tantôt une dépendance cognitive plus subtile. Michel Lévy-Provençal parle d’un continuum : « le plus grand danger d’une IA comme ChatGPT, c’est la dépendance cognitive »mikiane.com. Aux extrêmes, un individu hyperconnecté, habitué à ce qu’« une IA réponde à toutes ses questions », pourrait éprouver « de grandes difficultés à se concentrer de lui-même ou à réfléchir sans assistance »mikiane.com. Ce scénario est comparable à ce que certains appellent la « démence numérique » (digital dementia) – un usage intensif de la technologie au quotidien qui rendrait l’esprit paresseux et oublieux. Les neurosciences n’ont pas encore démontré formellement ce phénomène, mais les premières recherches suggèrent que des zones du cerveau liées à l’attention ou la mémoire de travail pourraient tout simplement se réhabituer à une stimulation moindremikiane.com.

D’autres experts pointent le caractère « conversationnel » de ChatGPT comme facteur potentiel d’addiction psychologique. Une équipe du Bournemouth University alerte que, en mimant une interaction humaine continue, ChatGPT peut créer un « sentiment de connexion ou de familiarité » avec l’utilisateurbournemouth.ac.uk. Cette relation factice, bien qu’amicale, encouragerait une utilisation excessive pour combler des besoins sociaux ou émotionnels. De fait, les chercheurs soulignent que le désir de réponses immédiates et le confort d’une « conversation » virtuelle peuvent conduire à solliciter ChatGPT en permanence – avec les répercussions « fréquemment associées à l’addiction à Internet »: isolement social, érosion des compétences interpersonnelles et troubles de la concentrationbournemouth.ac.ukbournemouth.ac.uk.

Au-delà de l’addiction émotionnelle, la dépendance cognitive pure signifie que, chaque fois qu’on « court vers » l’IA au lieu d’affronter une question complexe, on ratatine notre autonomie intellectuelle. C’est ce même principe de « délestage cognitif » dénoncé par les chercheurs en éducationpmc.ncbi.nlm.nih.govpmc.ncbi.nlm.nih.gov. En ne s’engageant plus pleinement dans le raisonnement ni dans l’effort créatif, l’utilisateur à risque peut voir s’atrophier ses « muscles mentaux ».

Nouvelles façons d’apprendre et de travailler

L’usage intensif de ChatGPT transforme d’ores et déjà les méthodes d’apprentissage et de travail. Plutôt qu’un travail purement manuel de rédaction ou de calcul, l’utilisateur devient le superviseur de l’IA. Comme l’explique la Collimateur de l’UQAM, les professionnels passent désormais « plus de temps à évaluer et à adapter les résultats de l’IA » et à peaufiner les prompts qu’à produire du contenu directementcollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca. Le « prompt engineering » – l’art de formuler la bonne requête – est en passe de devenir une compétence centrale dans de nombreux métiers (éducation, recherche, communication, etc.).

Ce changement implique un apprentissage de nouvelles stratégies. Par exemple, les utilisateurs doivent intégrer la vérification des sources et l’analyse critique des réponses de l’IA, ce qui était moins courant auparavantcollimateur.uqam.ca. En éducation, certains formateurs proposent ainsi d’encadrer l’usage de ChatGPT : au lieu de systématiquement chercher la réponse dans l’outil, on alterne avec des phases d’« active recall » (se tester soi-même avant d’utiliser l’IA), afin de conserver l’entraînement de la mémoirepmc.ncbi.nlm.nih.gov. En entreprise, on observe déjà que la supervision d’un chatbot fait appel à d’autres compétences : créativité dans la formulation des questions, esprit critique dans l’évaluation des réponses, et maîtrise des outils numériques pour guider la machinecollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca.

Cela dit, l’intégration de ChatGPT bouleverse aussi les modes de collaboration. Des assistants virtuels comme Copilot ou Gemini, basés sur les mêmes LLM, sont souvent conçus pour travailler dans le flux de travail (code, documents, présentations). On parle alors de nouvelle « écosystème cognitive » où l’humain et la machine co-créent le savoir. Les gouvernements et écoles y voient un défi pédagogique majeur : comme le sénat le résume, il faut « éduquer à l’IA et éduquer par l’IA » pour que les citoyens apprennent à l’utiliser de façon critique et efficace, tout en enrichissant les apprentissages grâce à la personnalisation des outilssenat.frsenat.fr.

Points de vue d’experts et recommandations

L’opinion d’experts de divers horizons converge souvent vers la prudence. Dans la communauté scientifique et universitaire, nombreux sont ceux qui soutiennent que l’IA doit demeurer un outil d’aide, non un bras long du cerveau. Par exemple, Dubey et al. (2024) insistent sur le fait que ChatGPT, malgré ses capacités, ne devrait pas remplacer nos facultés de base et qu’il faut maintenir un équilibre pour ne pas « s’abîmer » en n’utilisant plus son propre cerveauesmed.org. Des psychologues et pédagogues soulignent l’urgence de développer l’esprit critique face à l’IA afin de préserver l’autonomie cognitive. Une tribune de spécialistes de l’éducation a même été publiée pour appeler à recadrer l’usage de ChatGPT dans les écoles, insistant sur le « décrochage cognitif » potentiel des élèves non guidés (voir Collimateur et tribunes sur aoc.media). Dans le milieu scientifique plus large, des neuroscientifiques comme Michel Desmurget rappellent que, sur le plan cognitif, l’enjeu n’est pas spécifique à ChatGPT : l’écrasante dépendance aux écrans et moteurs de recherche a déjà produit des effets inquiétants sur la mémoire et l’attentionsenat.frsenat.fr.

Cependant, il existe un courant d’experts qui tempère ces mises en garde. Certains chercheurs estiment que l’IA peut véritablement libérer des ressources mentales pour des tâches à plus haute valeur ajoutée (problèmes complexes, pensée critique, créativité). D’après la méta-analyse récente (février 2025) parue dans Humanities and Social Sciences Communications, ChatGPT a un « impact largement positif » sur la performance d’apprentissage et un effet modérément positif sur la pensée de niveau supérieur (comprenant des facettes de la créativité et du raisonnement)nature.com. Cette synthèse de 51 études souligne en fait qu’il n’y a pas de conclusion unanime : certains travaux indiquent que ChatGPT améliore l’engagement et l’apprentissage (Jalil et al., 2023; Kasneci et al., 2023; etc.), tandis que d’autres ne voient pas d’effet ou même un effet négatif (Niloy et al., 2023; Yang et al., 2025)nature.com.

Au-delà des résultats chiffrés, plusieurs universitaires notent qu’il s’agit aussi d’une question de pédagogie. ChatGPT peut être bénéfique si les enseignants l’intègrent intelligemment dans les activités (p.ex. en l’utilisant comme base de départ pour une discussion en classe, ou en demandant aux élèves de justifier/corriger ses réponses). En revanche, son usage pur et simple sans consignes peut encourager la paresse. Le consensus est de promouvoir l’« éducation aux médias numériques » et à l’esprit critique : enseigner aux élèves à vérifier ce que dit l’IA, à détecter ses erreurs (hallucinations) et à conserver des exercices réguliers de rédaction et de calcul mental pour entretenir leurs compétences de base.

Contre-arguments et nuances

Il convient de relativiser les craintes. Comme noté, aucun expert ne prétend que l’IA va instantanément « détruire » notre intelligence. Plusieurs éléments apportent des contrepoints. D’abord, l’argument selon lequel ChatGPT « appauvrit la mémoire » n’est pas nouveau : on le trouve dès l’ère des encyclopédies en ligne et de Google. De récentes analyses démystifient cette idée (« amnésie numérique non prouvée »)sciencepresse.qc.ca. Deuxièmement, l’IA générative offre de réels apprentissages : les résultats d’une enquête exploratoire (Lee et al., CHI 2025) indiquent par exemple que l’usage de l’IA n’abolit pas la pensée critique mais la déplace et la complète – les utilisateurs passent plus de temps à réfléchir sur les prompts et les réponses qu’ils produisent, ce qui peut maintenir l’engagement intellectuel sous une autre formecollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca. Enfin, divers experts en neurosciences et psychologie insistent sur la plasticité du cerveau : si certaines fonctions cognitive sont moins sollicitées (mémoire muette), d’autres se renforcent (par ex. l’adaptation, la sélection de l’information pertinente).

Sur le plan empirique, il manque à ce jour de preuves solides à long terme chez l’homme pour affirmer que ChatGPT « empoisonne » le cerveau. Les études disponibles montrent plutôt une ambivalence : tout l’enjeu sera de savoir comment on intègre ces outils dans nos vies. Plusieurs chercheurs (collège Bloom d’OpenAI; études universitaires) plaident pour un apprentissage complémentaire : apprendre à utiliser ChatGPT comme on apprendrait un outil mathématique – c’est-à-dire apprendre quand le consulter et quand résister à la tentation de l’utiliser. C’est d’ailleurs l’une des recommandations du rapport sénatorial : plutôt que d’interdire l’outil ou de diaboliser les technologies, « il faut éduquer à l’IA » et développer des programmes de formation numérique pour le publicsenat.fr. L’objectif est de garantir que, loin de remplacer les cerveaux, l’IA augmente nos capacités en nous obligeant simultanément à rester vigilants et critiques.

Conclusion

En définitive, l’hypothèse d’un « empoisonnement » généralisé du cerveau par ChatGPT paraît excessivement alarmiste si l’on en juge les données scientifiques actuelles. Toutefois, l’usage prolongé et non conscient de ces systèmes génère des risques bien réels : atrophie de certaines compétences automatiques (mémoire, calcul mental, recherche documentaire), érosion de la concentration et du jugement critique, dépendance cognitive. Les spécialistes s’accordent pour dire que le principal danger serait de laisser l’outil fonctionner sans garde-fou. L’avenir dira si la « génération ChatGPT » saura conserver ses compétences fondamentales ou les laisser se déliter. De notre côté, les études récentes invitent à un usage réfléchi : utiliser ChatGPT comme un assistant pour enrichir nos processus mentaux, tout en continuant d’exercer activement notre mémoire, notre attention et notre créativité. Les expériences de cette vie numérisée seront décisives : un usage éduqué de l’IA pourrait transformer l’outil en un soutien cognitif précieux, là où une dépendance passive le ferait ressembler, au pire, à un sédatif pour l’esprit.

Sources principales : rapports d’experts et articles académiques de 2023-2025 sur l’impact cognitif de l’IA (Dubey et al., 2024esmed.org ; Center for Lifelong Learning and AI, 2025nature.com ; Philippe De Sousa, rapport sénat 2024senat.frsenat.fr ; études en sciences de l’éducation et cognitionpmc.ncbi.nlm.nih.govpmc.ncbi.nlm.nih.gov ; analyses du Collimateur UQAMcollimateur.uqam.cacollimateur.uqam.ca et interviews de spécialistessocialter.fr).

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