Co-créer avec vos clients : outil stratégique ou perte de temps ?

Impliquer activement les clients dans l’innovation autrefois relevait de l’utopie. Aujourd’hui, la co-création s’impose comme une tendance de fond dans le monde de l’entreprise fanvoice.com.
Que ce soit dans les services, l’industrie ou le retail, de plus en plus de dirigeants s’interrogent : associer les clients à la conception de nouveaux produits ou services est-ce un levier stratégique d’innovation ou une initiative vaine dilapidant temps et ressources ?
Les exemples récents abondent, des ateliers collaboratifs de DHL aux plateformes communautaires de Leroy Merlin, en passant par des produits entièrement « co-construits » par les consommateurs eux-mêmes.
La co-création, en misant sur l’écoute et la participation, aide les entreprises à mieux cerner les besoins du marché, à gagner en efficacité et à renforcer la confiance autour de leur marque fanvoice.com.
Elle est même considérée par certains comme un outil désormais indispensable, utilisée avec succès par des entreprises de premier plan fanvoice.com.
Cependant, toute médaille a son revers : certaines initiatives de co-création se sont soldées par des déceptions notables.
Alors, la co-création client est-elle un atout incontournable pour innover ou un mirage coûteux ?
Cet article propose une analyse approfondie et nuancée – alliage de réflexion stratégique et de cas concrets – pour éclairer les dirigeants sur les bénéfices, risques, conditions de réussite et idées reçues liés à la co-création avec les clients.
Co-création : de quoi parle-t-on ?
Concrètement, la co-création désigne une démarche d’innovation collaborative où l’entreprise conçoit ses offres avec ses parties prenantes, notamment ses clients. « Elle consiste à faire participer les parties prenantes de son écosystème à la résolution des problèmes ou à la création de valeur »fanvoice.com. Autrement dit, au lieu de se limiter aux équipes internes, l’entreprise ouvre son processus de création à des contributions externes : avis, idées, tests, feedbacks, etc. Il peut s’agir de solliciter les consommateurs sur l’amélioration d’un service, d’impliquer des utilisateurs pilotes dans le développement d’un produit, ou de faire voter une communauté sur les caractéristiques d’une future offre.
Cette approche va bien au-delà d’un simple sondage marketing ponctuel. La co-création s’inscrit sur l’ensemble du cycle de vie d’un produit ou service : de l’idéation initiale jusqu’au bêta-test, puis à l’expérience utilisateur et même à la fidélisation sur le long terme fanvoice.com.
Contrairement à l’idée reçue selon laquelle elle ne se limiterait qu’à des choix cosmétiques, comme la couleur d’un logo, la co-création invite les clients à s’exprimer sur des aspects stratégiques, techniques et fonctionnels du produit fanvoice.com.
C’est une démarche continue et intégrée, visant à impliquer les utilisateurs dans la création de solutions adaptées à leurs besoins – une implication bien plus profonde qu’une simple enquête de satisfaction.
Sur le plan conceptuel, la co-création s’enracine dans la notion de « création conjointe de valeur » popularisée il y a plus d’une décennie par des experts en stratégie.
L’idée centrale est que l’entreprise et ses clients peuvent, ensemble, innover mieux et plus vite que chacun de son côté. Les consommateurs deviennent co-innovateurs : ils apportent leurs idées, partagent leurs usages et aident à orienter la conception vers ce qui a le plus de valeur à leurs yeux.
En échange, ils obtiennent des produits ou services plus en phase avec leurs attentes, et souvent le sentiment valorisant d’être écoutés et utiles.
Tous les secteurs sont concernés. Longtemps associée aux produits de grande consommation, la co-création trouve aussi sa place dans les services et l’industrie. De la mode à la banque, de la logistique au BTP, aucune branche n’est a priori exclue fanvoice.com.
Par exemple, la SNCF fait appel à ses usagers pour améliorer en continu son application mobile, le fabricant domotique Somfy fait bêta-tester ses innovations par ses clients, et le groupe de construction Eiffage implique des parties prenantes pour enrichir ses actions en matière de RSE (responsabilité sociale)fanvoice.com.
Ces exemples illustrent que la co-création n’est ni un gadget réservé aux start-up technos, ni l’apanage d’un secteur « grand public ». Bien menée, elle peut s’appliquer à tout domaine d’activité et tout type de projet, dès lors qu’il existe des utilisateurs finaux ou des clients dont l’expérience peut nourrir la conception.
Des bénéfices stratégiques indéniables
Sur le papier, les arguments en faveur de la co-création sont convaincants. Impliquer ses clients permet d’abord de mieux cibler leurs attentes et ainsi d’éviter le faux-pas classique du produit développé en vase clos qui fait un flop une fois sur le marché.
En effet, de nombreux projets échouent parce qu’ils sont pensés en silo, sur la base d’hypothèses internes déconnectées du terrain fanvoice.com.
La co-création corrige ce biais en connectant directement l’entreprise aux besoins réels des utilisateurs : elle aide à comprendre en amont leurs usages, leurs irritants, leurs préférences, et à tester des concepts avant d’investir lourdement fanvoice.com.
Les études montrent que cette approche améliore significativement la pertinence des offres et l’expérience client.
D’après Fanvoice, une société spécialisée dans la co-innovation, « la co-création se révèle être l’une des solutions les plus efficaces pour surmonter les échecs de vente dus à un mauvais ciblage des besoins […] sur le marché » fanvoice.com.
En d’autres termes, intégrer la voix du client tout au long du développement réduit le risque de passer à côté de la cible. C’est un gain de ROI : moins de chances de lancer un produit non désiré, donc un investissement plus sûr.
Ensuite, faire participer les clients peut accroître la rapidité et la créativité de l’innovation. Au lieu de mobiliser uniquement des ressources internes, l’entreprise profite d’une intelligence collective élargie.
Les clients apportent des idées fraîches, parfois inattendues. Ils peuvent signaler des usages émergents ou des problèmes à résoudre que l’entreprise n’avait pas identifiés.
Par exemple, la marque de cosmétique française Nidéco a vu une cliente venir exprimer un besoin non couvert – un soin pour soulager les douleurs menstruelles liées à l’endométriose – et a co-créé avec elle et 4000 testeuses le produit correspondant kissthebride.fr.
Sans cette écoute proactive, ce besoin serait peut-être resté insatisfait. En sollicitant ainsi les utilisateurs, la co-création stimule la créativité et ouvre de nouveaux gisements d’innovation.
Le troisième bénéfice est relationnel et marketing. Inviter ses clients « dans les coulisses » de la création renforce leur engagement et leur loyauté. Un client qui co-crée se sent considéré comme un partenaire ; il développe un attachement plus fort à la marque.
Cette dernière en retire une image de proximité et d’ouverture. Des consommateurs impliqués deviennent souvent de véritables ambassadeurs, fiers de promouvoir un produit qu’ils ont contribué à concevoir 1min30.com.
Ainsi, la co-création peut générer un précieux bouche-à-oreille positif et une communauté de fans active. Le cas de LEGO est emblématique : via sa plateforme en ligne LEGO Ideas, le fabricant de jouets recueille des milliers de propositions de nouveaux kits.
Les fans votent, LEGO produit les meilleurs concepts (comme la DeLorean de Retour vers le Futur ou le pack Ghostbusters issus d’idées de fans) et crédite l’auteur sur la boîte, en lui reversant 1% des ventes 1min30.com 1min30.com.
Non seulement LEGO innove ainsi à moindre frais, mais chaque lancement co-créé s’accompagne d’une puissante promotion organique par la communauté. « Cette stratégie encourage les fans de Lego à partager de nouvelles idées. De son côté, la marque ne dépense rien en stratégie marketing »1min30.com. En bref, un produit co-créé a toutes les chances de trouver son public immédiatement, car ce public a participé à sa gestation.
Autre avantage non négligeable : la réduction des coûts et des délais de développement. Certaines entreprises constatent que faire appel à leurs clients leur permet d’économiser sur la R&D ou les études de marché.
Par exemple, le fabricant d’outils électroportatifs DeWalt a créé une communauté en ligne où plus de 12 000 utilisateurs (professionnels et bricoleurs) soumettent des idées et testent des prototypes.
Résultat : en quelques années, DeWalt a pu améliorer plusieurs produits (comme une nouvelle perceuse sans fil issue de suggestions clients) et estime avoir économisé près de 6 millions de dollars en coûts de recherche grâce à cette communauté d’insights braineet.com.
De même, DHL a impliqué ses grands clients industriels dans des ateliers d’idéation (ses Innovation Centers à Singapour, en Allemagne et aux USA) pour repenser ses services logistiques.
Une des idées issues de ces sessions a abouti au drone de livraison Parcelopter pour desservir les zones difficiles braineet.com braineet.com.
DHL y a gagné une accélération des livraisons (passées de 30 minutes à 8 minutes sur certaines zones grâce au drone) et une envolée de la satisfaction client.
En effet, ses initiatives de co-création se sont révélées payantes : « la co-création a permis à DHL d’augmenter la satisfaction de sa clientèle de plus de 80% », et l’entreprise a organisé plus de 6 000 sessions de co-création à travers le monde braineet.com.
Ces chiffres concrets démontrent que la co-création peut directement améliorer des KPI stratégiques comme la fidélisation et l’efficacité opérationnelle.
Enfin, la co-création contribue à renforcer la confiance et la transparence. En impliquant ouvertement ses clients dans ses réflexions, l’entreprise joue la carte de l’humilité et de l’écoute. Cela peut être particulièrement utile pour (re)conquérir un marché. Heineken par exemple, a organisé dès 2012 un concours de design collaboratif pour imaginer le bar du futur, impliquant des milliers de fans dans le processus créatif braineet.com braineet.com.
Au-delà du concept innovant dévoilé lors de la Milan Design Week, cette opération a redoré le blason de la marque en montrant qu’une grande entreprise pouvait co-créer main dans la main avec sa communauté de designers et de consommateurs.
De même, Coca-Cola a récemment mené des programmes de co-création en Asie du Sud-Est pour adapter ses boissons aux goûts locaux, en faisant déguster aux consommateurs des variations de recettes et en recueillant leurs retours braineet.com braineet.com.
Cette démarche collaborative très transparente aide Coca-Cola à s’assurer que chaque marché a « son » Coca, parfaitement ajusté aux attentes régionales – un gage de pertinence locale et de confiance des clients dans la marque.
En résumé, utilisée à bon escient, la co-création offre des bénéfices multiples : innovation plus sûre et plus féconde, clients plus satisfaits et engagés, optimisation des coûts, renforcement de l’image de marque…
De quoi la considérer résolument comme un véritable outil stratégique au service de la croissance et de la différenciation fanvoice.com fanvoice.com.
Les risques et limites à prendre en compte
Malgré ses promesses, la co-création n’est pas une recette magique dénuée de défis. Plusieurs risques et limites doivent être gardés à l’esprit par les dirigeants avant de se lancer, sous peine de transformer ce qui devait être un atout en possible perte de temps (et d’argent).
Premier risque : la perte de contrôle. En ouvrant la porte aux idées extérieures, l’entreprise s’expose à des suggestions qui peuvent s’éloigner de sa vision ou de sa stratégie. Les clients ont des attentes diverses, parfois contradictoires ou irréalistes linkedin.com.
Il peut devenir ardu de garder un cap clair quand affluent des centaines de propositions. Par exemple, lors de certaines campagnes participatives très médiatisées, des contributeurs ont proposé des idées farfelues, voire contraire à l’esprit de la marque.
Un cas célèbre est celui du concours public pour nommer un navire océanographique britannique, où le nom plébiscité fut « Boaty McBoatface » – plaisanterie virale qui a mis les organisateurs dans l’embarras braineet.com.
Dans d’autres situations, des clients profitent de plateformes de co-création pour émettre des critiques acerbes ou tourner l’entreprise en ridicule.
Des chercheurs constatent même que « certains clients détournent ces programmes : au lieu d’offrir de vraies idées, ils saisissent l’occasion de ridiculiser la compagnie », ce qui constitue un des principaux défis de la co-création, au point que près de la moitié des campagnes de co-création échoueraient selon leurs estimations novakashleyblog.wordpress.com.
On le voit, sans un minimum de modération et d’orientation, une initiative collaborative peut facilement déraper ou être “polluée” par des propositions non constructives.
Deuxième écueil : le coût caché en temps et en ressources. Contrairement à l’idée que la foule travaillerait pour vous gratuitement, animer une communauté de co-création réclame un investissement considérable.
Il faut recruter les participants, les motiver, modérer les échanges, analyser les idées et les transformer en plans d’action. Tout cela mobilise des équipes en interne. Si ces efforts ne sont pas bien dimensionnés, la co-création peut devenir chronophage et onéreuse.
Le cas de MyStarbucksIdea est souvent cité à cet égard. Starbucks avait lancé en 2008 une plateforme ouverte où les clients pouvaient proposer et voter des idées pour la chaîne de cafés. En apparence, un succès : plus de 150 000 idées soumises en quelques années. Mais seulement 150 idées ont réellement été mises en œuvre, soit 0,13% des suggestions intotheminds.com.
Et ces idées réalisées étaient essentiellement des améliorations mineures (une nouvelle saveur de boisson, un sandwich végétarien, l’installation du Wi-Fi en magasin…) – rien de très révolutionnaire.
Pour gérer cet afflux, Starbucks avait dédié une équipe de 48 employés à plein temps (“Idea Partners”), supervisés par un cadre dirigeant.
En quatre ans, ce sont plus de 250 000 heures de travail qui ont été consacrées à trier et valider les idées intotheminds.com.
L’initiative a coûté au bas mot 1,8 million de dollars en frais de traitement des idées – soit plus de 12 000$ par idée retenue, sans compter le coût de mise en œuvre sur le terrain intotheminds.com.
Le bilan a de quoi interroger : peu d’innovations majeures au regard des moyens engagés. Un analyste a ainsi qualifié MyStarbucksIdea de « formidable échec », réussissant certes comme opération de communication et de dialogue, mais peu rentable comme usine à innovations intotheminds.com.
Cette leçon montre qu’une co-création mal cadrée peut engloutir beaucoup de temps et d’argent pour des résultats décevants.
Troisième limite : la complexité de l’exploitation des idées. Recueillir des centaines d’avis est une chose, les traduire en actions concrètes en est une autre.
L’entreprise doit trier les bonnes idées des moins bonnes, évaluer leur faisabilité technique et économique, et parfois arbitrer entre des retours divergents.
Cela suppose d’avoir en interne une organisation agile, capable de traiter ces données qualitatives massives (parfois appelées “insights clients”) et de les intégrer au process de développement. Sans méthode, on risque la “paralysie par l’analyse” ou la dilution des responsabilités.
De plus, impliquer des non-professionnels peut nécessiter de simplifier le processus d’innovation pour le rendre accessible, ce qui n’est pas toujours évident sur des sujets techniques pointus.
Certaines entreprises craignent aussi un manque de compétence des clients sur des sujets complexes : idées peu réalistes, solutions naïves déjà essayées par le passé… Il faut accepter que tout ne sera pas exploitable et savoir canaliser les efforts sur ce qui apporte de la valeur.
Quatrième risque : les questions juridiques et éthiques. Co-créer avec des externes soulève la question de la propriété intellectuelle des idées proposées.
Qui détient les droits sur un concept soumis par un client et ensuite développé par l’entreprise ? Il est crucial de cadrer cela via des conditions d’utilisation claires (généralement, les participants cèdent leurs droits à l’entreprise en échange éventuellement d’une compensation ou d’une reconnaissance).
Omettre cet aspect peut conduire à des litiges ultérieurs si un produit co-créé connaît le succès commercial. Par ailleurs, la co-création implique parfois de partager des informations en amont avec les clients (par exemple un prototype en développement).
Cela nécessite de gérer la confidentialité pour ne pas divulguer de secrets industriels ou prendre de l’avance sur la concurrence.
Enfin, sur le plan éthique, il faut veiller à la transparence vis-à-vis des participants : que va devenir leur idée, comment seront-ils crédités ou récompensés, etc.
Une mauvaise gestion des attentes peut engendrer de la frustration chez les clients contributeurs – le contraire de l’effet recherché. Solliciter l’avis des consommateurs crée en eux l’espoir d’être écoutés ; si rien ne se concrétise ou si l’entreprise semble récupérer les lauriers sans remercier la communauté, le retour de bâton en image peut être sévère.
En somme, la co-création n’est pas une démarche anodine. Sans une vision claire et une exécution rigoureuse, elle peut s’avérer improductive, voire contre-productive.
Solliciter trop largement “la foule” sans savoir filtrer et exploiter les contributions, c’est prendre le risque de se noyer dans le bruit ou de s’éparpiller.
De même, sous-estimer les ressources nécessaires à l’animation et au suivi, c’est s’exposer à un enlisement du projet co-créatif. La co-création n’est donc un outil stratégique que si elle est maîtrisée. Sinon, effectivement, mieux vaudrait consacrer ce temps et cette énergie à d’autres priorités.
Fausses croyances autour de la co-création
Avant d’aborder comment réussir une démarche de co-création, il est utile de démonter quelques idées reçues tenaces qui peuvent biaiser la vision qu’en ont les dirigeants. Voici cinq fausses croyances courantes – et pourquoi elles ne tiennent pas face à la réalité :
Idée reçue n°1 : « La co-création se limite à des détails superficiels. » – Faux ! Comme évoqué plus haut, la co-création peut couvrir tout le cycle de vie d’un produit ou service, depuis la recherche d’insights initiaux jusqu’au test bêta et à l’optimisation post-lancement fanvoice.com. Ce n’est pas qu’un concours de design ou un vote sur le prochain parfum d’une boisson. Des entreprises l’utilisent pour des problématiques de fond : définition des besoins, conception fonctionnelle, amélioration de l’expérience, etc. Par exemple, la banque Crédit Mutuel a invité ses clients à co-construire de nouveaux services en ligne pendant la pandémie, et la SNCF, comme on l’a vu, implique les usagers dans l’ergonomie de ses applis mobiles – on est loin de questions esthétiques anecdotiques.
Idée reçue n°2 : « Seuls les fans ou influenceurs peuvent apporter quelque chose. » – Faux ! La co-création peut s’adresser à tous les profils de clients, pas uniquement à une élite hyper-engagée ou experte fanvoice.com. Chaque segment d’utilisateur peut livrer des perspectives utiles. Les influenceurs ont certes une portée médiatique, mais le client lambda a aussi son mot à dire sur ce qui lui convient ou non. D’ailleurs, impliquer un panel diversifié (clients fidèles, nouveaux clients, prospects, employés, partenaires…) enrichit la créativité et donne des résultats plus représentatifs. L’important est que les participants aient un lien avec la marque ou l’usage du produit, pas qu’ils soient « célèbres » ou ultra-enthousiastes. Dans le secteur industriel B2B par exemple, on pourra co-créer avec les techniciens ou opérateurs chez le client, qui ne sont pas des influenceurs médiatiques mais dont le retour d’expérience est crucial.
Idée reçue n°3 : « La co-création n’est qu’un coup marketing à la mode. » – Faux ! Bien conduite, la co-création est un véritable levier stratégique de différenciation et de création de valeur, pas une simple opération de com’ ponctuelle fanvoice.com. Elle s’inscrit dans une démarche continue où l’entreprise place ses clients au cœur de l’innovation. On l’a vu avec des exemples comme LEGO, Decathlon ou C’est qui le Patron?! (voir plus loin) : ces organisations ont intégré la co-création dans leur modèle d’affaires sur le long terme, et en tirent des bénéfices tangibles (fidélité, croissance, image…). Ce n’est donc pas un gadget cosmétique pour faire le buzz une fois, mais bien une approche de fond, parfois structurante dans la stratégie produit. Évidemment, il ne faut pas non plus “sur-vendre” la co-création comme solution miracle à tout. Elle doit avoir un but business clair. Mais correctement alignée aux objectifs de l’entreprise, ce n’est pas une mode éphémère : c’est une évolution dans la manière d’innover de façon plus ouverte et collaborative.
Idée reçue n°4 : « Co-créer est trop complexe et coûteux à mettre en place. » – Pas nécessairement. Certes, comme on l’a souligné dans les risques, cela demande méthode et ressources. Cependant, aujourd’hui il existe des outils digitaux et des méthodologies éprouvées qui facilitent grandement la tâche fanvoice.com. Des plateformes en ligne spécialisées (telles que celles proposées par Fanvoice, Braineet, etc.) permettent de recruter une communauté, de la faire interagir (idées, votes, commentaires) et d’analyser les contributions efficacement. La démarche peut ainsi être structurée de manière agile. Par ailleurs, le coût doit être mis en regard des gains potentiels : si co-créer permet d’éviter un échec produit coûteux ou de réduire le délai de mise sur le marché, le retour sur investissement peut être très positif fanvoice.com. Beaucoup d’entreprises démarrent d’ailleurs par des pilotes ciblés (par exemple co-développer une fonctionnalité avec un petit groupe de clients) afin d’en maîtriser la complexité. En commençant petit et en apprenant en cours de route, on peut limiter les frais tout en récoltant les fruits rapidement.
Idée reçue n°5 : « La co-création n’est pas adaptée à mon secteur d’activité. » – Faux ! Comme déjà mentionné, tous les secteurs peuvent y trouver un intérêt fanvoice.com. B2C ou B2B, produit tangible ou service intangible, grande entreprise ou PME locale – la clé est de bien définir qui sont vos « clients » ou utilisateurs, et comment ils peuvent contribuer. Dans l’automobile, on voit des constructeurs organiser des concours d’idées sur la mobilité de demain (BMW a été précurseur dès 2010 avec son concours “Tomorrow’s Urban Mobility” qui a recueilli 300 idées de fans braineet.com braineet.com). Dans la grande distribution, des enseignes comme Auchan impliquent leurs consommateurs pour repenser les emballages de leurs produits marques propres fanvoice.com. Dans l’agroalimentaire, une coopérative comme C’est qui le Patron?! a même poussé la co-création à son paroxysme en faisant définir par les clients eux-mêmes le cahier des charges et le prix de produits alimentaires – par exemple, ce sont les consommateurs adhérents de l’initiative qui ont collectivement établi les critères du lait CQLP (alimentation des vaches sans OGM, juste rémunération du producteur, etc.) et déterminé le prix juste correspondant cestquilepatron.com. Autrement dit, il n’y a pas de secteur où la voix du client ne puisse apporter de la valeur. Que l’on parle d’innovation produit, d’amélioration de service, d’expérience utilisateur ou même de programmes RSE, la co-création peut s’avérer pertinente dès lors qu’on a une communauté prête à s’engager.
En dissipant ces malentendus, on comprend que la co-création, loin d’être gadget ou réservée à quelques domaines, est une approche polyvalente qui peut, si elle est bien employée, profiter à tout type d’organisation. Reste à savoir comment la mettre en œuvre efficacement pour éviter les écueils évoqués.
Les clés du succès pour co-créer efficacement
Si un dirigeant décide de tenter l’aventure de la co-création avec ses clients, quelles sont les meilleures pratiques à adopter pour maximiser les chances de réussite ? Voici quelques principes stratégiques à suivre, dégagés de l’expérience des entreprises pionnières en la matière :
1. Définir des objectifs clairs et un périmètre précis. La co-création ne doit pas être une opération brouillonne où l’on demande “Des idées, s’il vous plaît !” sans cadre. Les initiatives les plus fructueuses sont celles qui posent une problématique bien ciblée aux participants braineet.com. Par exemple, plutôt que de lancer un appel vague du type « Que voudriez-vous comme nouveau produit ? », il vaut mieux formuler un défi concret : « Comment améliorer la facilité de montage de nos meubles ? » ou « Quelles fonctionnalités mobiles vous simplifieraient la banque au quotidien ? ».
En focalisant l’intelligence collective sur un sujet défini, on obtient des contributions plus pertinentes et actionnables braineet.com. Déterminez donc en amont sur quoi vous voulez co-créer (une amélioration incrémentale, une innovation de rupture, une expérience client, etc.) et avec qui (quel segment de clients, ou éventuellement mix clients/collaborateurs). Cela permettra de donner une direction aux participants et de cadrer vos analyses ensuite.
2. Soigner l’animation de la communauté. Une co-création réussie s’apparente à une campagne d’engagement à part entière. Il faut attirer suffisamment de participants qualifiés, les motiver à contribuer et entretenir leur intérêt sur la durée.
Cela passe par une communication claire sur le pourquoi de la démarche (expliquer aux clients qu’ils ont l’opportunité d’influencer un produit qu’ils utilisent, par exemple), par la facilitation des échanges (poser des questions, relancer la discussion, mettre en avant de bonnes idées pour inspirer les autres) et par la reconnaissance.
LEGO remercie publiquement et rémunère (symboliquement) les créateurs dont l’idée aboutit 1min30.com; Decathlon en fait de même avec les clients à l’origine de produits co-développés. Sans nécessairement verser de l’argent, on peut offrir des récompenses non monétaires aux contributeurs actifs : accès en avant-première aux nouveautés, cadeaux, statut de membre VIP…
L’important est que les participants se sentent valorisés. Dans l’initiative de Leroy Merlin « La déco s’invite en quincaillerie », les clients sélectionnés étaient invités à partager leurs plus belles réalisations DIY et à échanger pendant plusieurs semaines, et la marque veillait à souligner les contributions de chacun – ce qui renforçait les liens communautaires et la préférence de marque chez ces clients ambassadeurs kissthebride.fr kissthebride.fr. On le voit, l’animation est le moteur qui transforme une foule passive en une communauté créative et soudée.
3. Assurer une analyse et un suivi rigoureux. Recueillir des idées n’a de sens que si l’entreprise est en mesure de les exploiter intelligemment.
Cela suppose d’avoir en interne (ou via un partenaire) une équipe dédiée qui va filtrer, synthétiser et évaluer les contributions. Les solutions technologiques peuvent aider : les plateformes de co-création offrent souvent des outils d’analyse (statistiques de votes, text mining des commentaires, etc.) pour faire émerger les tendances fortes.
Mais il ne faut pas négliger l’expertise humaine : des chefs de produits, ingénieurs ou marketeurs doivent se pencher sur les meilleures idées pour étudier leur faisabilité et leur alignement avec la stratégie. « La clé […] est d’étudier les projets proposés par les utilisateurs, de rester objectif et de créer une relation de proximité avec eux », rappelle un expert marketing 1min30.com.
Cela signifie qu’il faut savoir dire oui aux idées prometteuses (même si elles ne viennent pas du bureau d’études maison) tout en sachant expliquer non pour celles qui ne pourront être retenues. Cette transparence dans le tri fait partie du contrat de confiance avec la communauté.
Enfin, un plan d’action doit être défini pour développer les idées retenues : qui pilote, quels moyens, quel calendrier. Rien ne serait pire que de laisser les meilleures suggestions au placard faute de responsable désigné pour les concrétiser.
4. Intégrer la co-création dans la stratégie globale. La co-création ne doit pas être une initiative isolée, sans lien avec les processus habituels.
Au contraire, elle fonctionne bien quand elle est articulée avec la feuille de route d’innovation de l’entreprise.
Par exemple, Accor (hôtellerie) a intégré la co-création dans son innovation funnel global pour s’assurer que les idées collectées auprès de clients ciblés (comme les milléniaux voyageurs) s’alignent sur la stratégie d’expérience client du groupe, et pour faire transiter ces idées à travers un processus de filtrage et de prototypage interne rigoureux braineet.com.
De même, Unilever via sa plateforme Open Innovation sollicite des idées externes sur des problèmes très précis (packaging intelligent, technologies de refroidissement…) et offre un contrat commercial aux innovateurs retenus braineet.com braineet.com – ces appels à idées sont une composante à part entière de leur pipeline R&D. Pour un dirigeant, intégrer la co-création signifie aussi insuffler une culture d’ouverture en interne. Il faut que les équipes acceptent l’idée que “le client peut avoir raison” et peuvent proposer des améliorations ingénieuses. Cela implique un soutien affiché du top management pour légitimer la démarche. Quand la co-création est perçue en interne non pas comme une remise en cause du travail des équipes, mais comme un complément précieux nourrissant l’innovation, elle a beaucoup plus de chances de porter ses fruits.
5. Être prêt à agir et à itérer rapidement. Les clients qui participent donnent de leur temps parce qu’ils espèrent voir des changements concrets. Il est crucial de passer promptement des idées à l’action. Même si toutes les suggestions ne peuvent pas être implémentées immédiatement, il est judicieux d’identifier quelques “quick wins” et de les réaliser sans tarder, pour montrer à la communauté que son effort a un impact. Par exemple, si vous lancez une consultation et que 80% des participants demandent une petite amélioration faisable à court terme, essayez de la déployer au plus vite. Communiquez ensuite auprès de la communauté : « Suite à vos retours, nous avons le plaisir de vous annoncer que… ». Ce feedback loop entretenu renforce la motivation des clients à s’impliquer de nouveau. Par ailleurs, la co-création s’inscrit souvent dans un processus itératif. Il faut accepter de tester, apprendre, ajuster. On co-développe un prototype avec les utilisateurs, on le teste, on itère en fonction des retours, etc. Cette agilité, inspirée des méthodes lean startup, est parfaitement synergique avec l’esprit de la co-création. En somme, soyez réactif et adaptable : c’est dans ce mode dynamique que la collaboration entreprise-clients exprimera tout son potentiel.
En appliquant ces principes – ciblage, animation, analyse, alignement stratégique, réactivité – de nombreuses entreprises ont su transformer l’essai de la co-création en succès concrets.
Pour s’en convaincre, penchons-nous sur quelques études de cas récentes dans nos trois secteurs de prédilection (services, industrie, retail), illustrant tantôt des réussites éclatantes, tantôt des approches plus mitigées dont on peut tirer des leçons.
Études de cas : la co-création à l’œuvre
Dans les services : DHL et Accor innovent main dans la main avec leurs clients
Dans le secteur des services, qu’ils soient B2C ou B2B, la co-création vise souvent à améliorer l’expérience client ou à inventer de nouveaux services répondant finement aux besoins. Le géant de la logistique DHL en offre un exemple parlant.
Confronté aux défis du e-commerce et de la livraison du “dernier kilomètre”, DHL a choisi dès le début des années 2010 d’impliquer ses clients (expéditeurs et destinataires) dans la recherche de solutions. L’entreprise a ouvert des ateliers de co-création – appelés DHL Innovation Centers – où ses équipes brainstorment avec des clients sur des améliorations de services braineet.com braineet.com.
C’est lors d’une session en Allemagne qu’a émergé l’idée d’utiliser des drones pour livrer des colis dans des zones difficiles d’accès. Le prototype, surnommé Parcelopter, a été développé puis testé en conditions réelles en montagne braineet.com.
Le succès fut au rendez-vous : le drone permettait de diviser drastiquement le temps de livraison sur ces trajets spécifiques (de 30 minutes à 8 minutes) et offrait une solution en cas d’absence de routes praticables braineet.com braineet.com.
Fort de ce résultat, DHL a multiplié les initiatives de co-création. À ce jour, plus de 6 000 sessions ont été organisées impliquant des clients autour du globe braineet.com.
Les bénéfices mesurés sont considérables : satisfaction client en hausse de plus de 80%, fidélité accrue, et des idées implémentées allant de l’amélioration du suivi colis en temps réel à la conception de nouveaux emballages écologiques braineet.com.
DHL démontre ainsi que même une très grande entreprise de services (500 000 employés dans le monde) peut garder une démarche agile d’innovation ouverte, et en retirer des avantages compétitifs tangibles.
Un autre exemple intéressant est celui du groupe hôtelier Accor. L’hospitalité est un domaine où l’expérience utilisateur est reine, et Accor a compris l’intérêt de co-créer certaines offres avec ses clients. En 2021, le groupe a intégré un processus de co-création dans son programme de fidélité “ALL – Accor Live Limitless”. L’idée était de faire remonter des idées d’amélioration du programme et des services hôteliers en impliquant directement des membres de ce programme (voyageurs fréquents, milléniaux digitaux, etc.). Accor a structuré cette démarche via un innovation funnel en 4 étapes : collecte d’idées, prototypage, test, déploiementbraineet.combraineet.com. À chaque étape, les clients cibles sont sollicités – par exemple via des ateliers en ligne – pour s’assurer que l’idée reste alignée avec leurs attentes. Cette organisation a permis de lancer plus rapidement des nouveautés dans le programme ALL, comme de nouveaux partenariats d’expériences locales et des fonctionnalités de l’app mobile correspondant précisément aux souhaits exprimés par les clients. L’effort de co-création s’est accompagné d’un discours marketing fort sur le thème “ce programme de fidélité, c’est aussi VOTRE programme, coconstruit avec vous”. Le résultat : une augmentation du taux d’adoption des nouvelles features de l’application et une progression de l’engagement des membres du programme, mesurée notamment par le NPS (Net Promoter Score) en hausse. Accor illustre bien comment co-créer peut devenir un levier de différenciation sur un service : en impliquant ses meilleurs clients, l’entreprise s’assure de développer des services qui font mouche et se distingue de la concurrence par cette proximité avec sa communauté.
D’autres acteurs de services pourraient être cités, qu’il s’agisse de banques co-créant des offres avec des clients pilotes, de sociétés de transport impliquant les usagers pour repenser l’information voyageur, ou encore d’opérateurs télécoms engageant leurs abonnés via des plateformes participatives pour améliorer la qualité de service. Dans tous les cas, la leçon est similaire : dans les services, la co-création permet de coller au plus près des attentes et de travailler sur des détails d’usage qui font la différence en satisfaction. Elle renforce également la relation client-prestataire, ce qui est crucial dans des activités où la confiance et la fidélité sont essentielles.
Dans l’industrie : vers un B2B2C collaboratif
Le secteur industriel et manufacturier, plus discret sur ces sujets, n’est pas en reste. La co-création y prend souvent la forme d’une collaboration étroite avec les clients professionnels ou les utilisateurs finaux pour orienter l’innovation technique. Prenons l’exemple de DeWalt, déjà évoqué plus haut. Ce fabricant d’outils destinés aux artisans et aux bricoleurs a su bâtir une communauté d’experts utilisateurs qui interagissent avec ses ingénieurs. Via la plateforme “DeWalt Insight Community”, plus de 8 000 professionnels (menuisiers, électriciens, etc.) et 4 000 amateurs éclairés donnent en continu leur feedback sur les produits, testent les prototypes et proposent des évolutionsbraineet.com. Grâce à cette mine d’informations terrain, DeWalt a pu développer des outils mieux adaptés aux besoins réels – par exemple une perceuse à percussion sans fil plus légère, répondant à une demande récurrente de la communauté. Surtout, l’entreprise estime que cette co-création lui a permis d’économiser environ 6 millions de dollars en frais de recherche et tests traditionnellement nécessaires pour arriver au même résultatbraineet.com. Ici, la co-création ne vise pas le buzz médiatique, mais bien une efficacité accrue en R&D et un avantage concurrentiel (sortir plus vite des produits mieux pensés). On observe une démarche similaire chez d’autres industriels : General Mills, géant de l’agroalimentaire, a mis en place dès 2007 un réseau d’innovation participatif ouvrant ses portes aux idées d’employés, de startups et de clients, qui alimente en permanence ses pipelines de nouveaux produitsbraineet.combraineet.com. BMW a lancé des concours en ligne pour impliquer des passionnés d’automobile dans la conception de services de mobilité urbaine, obtenant des centaines d’idées dont certaines ont inspiré de nouvelles fonctionnalités dans ses véhiculesbraineet.combraineet.com. Dans l’industrie chimique, des groupes comme Solvay ont monté des programmes de co-innovation avec leurs grands comptes pour développer en partenariat de nouveaux matériaux correspondant exactement aux besoins de ces clients clés – on parle alors de co-développement client.
Un cas intéressant de co-création B2B est celui de Tetra Pak, spécialiste de l’emballage alimentaire, qui a mis en place des centres d’innovation clients. Ils invitent les clients (les fabricants de produits alimentaires) à venir travailler conjointement avec les experts Tetra Pak sur de nouveaux emballages ou procédés. On y pratique le design thinking en équipe mixte fournisseur-client, avec prototypage rapide. Ce type de co-création renforce la relation de partenariat et aboutit à des solutions sur-mesure qui bénéficient aux deux parties. On pourrait presque parler de co-création inter-entreprises. L’idée forte est que dans l’industrie, intégrer le client dans l’innovation permet de sécuriser le débouché commercial (puisqu’on développe “avec” son futur acheteur) tout en partageant les coûts et le risque de R&D. C’est donc une démarche gagnant-gagnant lorsqu’elle est possible.
Notons aussi que l’industrie peut co-créer avec les utilisateurs finaux même si elle ne les adresse pas directement. Par exemple, Michelin fait appel à des conducteurs lambda pour tester et co-développer certaines gammes de pneus innovants, même si ses clients directs sont des distributeurs ou des constructeurs auto. De même, Boeing ou Airbus impliquent régulièrement les compagnies aériennes (leurs clients B2B) et parfois les pilotes ou personnels navigants (utilisateurs finaux de leurs cockpits et cabines) dans la conception des nouveaux appareils. Tout ceci montre que la co-création est transposable dans le B2B : il s’agit alors d’impliquer ses clients professionnels comme partenaires d’innovation pour mieux répondre à leurs besoins, et ainsi ferrer la relation commerciale sur le long terme.
Dans le retail : quand le client devient co-concepteur du produit
C’est sans doute dans le retail (biens de consommation, distribution, e-commerce) que la co-création avec les clients a été la plus visible ces dernières années, avec des initiatives parfois révolutionnaires du modèle classique producteur-consommateur. Le concept même de “consommateur-acteur” a pris tout son sens dans ce secteur.
Un exemple français emblématique est celui de la marque alimentaire C’est qui le Patron?!. Lancée en 2016, cette “marque du consommateur” repose entièrement sur la co-création : ce sont les clients eux-mêmes qui définissent les caractéristiques des produits qu’ils souhaitent acheter en privilégiant une rémunération juste des producteurs. Concrètement, via des questionnaires en ligne, des dizaines de milliers de consommateurs ont co-construit le cahier des charges de produits du quotidien (lait, beurre, jus de pomme, pizzas, etc.) : qualité des ingrédients, modes de production, marge raisonnable… puis ont voté le prix acceptable pour garantir ces critères. « Nous consommateurs, nous votons collectivement les critères des produits et leur juste prix » annonce fièrement la marquecestquilepatron.com. Le succès a dépassé toutes les attentes : le lait CQLP est devenu l’une des meilleures ventes en rayon en France, prouvant que le public répond présent pour des produits qu’il a aidé à créer. Ici, la co-création est au cœur du business model. Bien sûr, tout le monde n’ira pas jusqu’à transformer ses clients en véritable service R&D comme l’a fait CQLP, mais cette expérience prouve qu’il y a une appétence des consommateurs pour participer et qu’ils le font de façon responsable et réfléchie. D’autres enseignes se sont inspirées de ce modèle pour certaines gammes. Par exemple, Auchan a travaillé avec la communauté CQLP pour développer sa gamme de produits « C’est qui le Patron?! » en marque de distributeur, garantissant des pratiques durables et éthiques validées par les consommateursfanvoice.com.
Dans le retail non alimentaire, on assiste également à des co-créations très concrètes. Decathlon, le géant du sport, a co-développé l’un de ses produits iconiques – la tente “2 Seconds” à montage instantané – en impliquant ses clients campeurs. Grâce à sa plateforme participative, Decathlon a recueilli d’innombrables suggestions sur ce que devrait être la tente idéale (facilité de pliage, résistance au vent, habitabilité…), puis a fait tester les prototypes à des utilisateurs sur le terrainfanvoice.com. Le résultat, lancé il y a plus de 15 ans, a été un best-seller qui a fait la renommée de la marque. Et Decathlon continue sur cette lancée : régulièrement, l’enseigne organise des tests de nouveaux produits avec sa communauté “Decathlon Co-Creation”, comme récemment sur une version familiale de la tente 2 Seconds en montagne, pour collecter les retours avant mise en marchécocreation.decathlon.fr. Cette démarche s’inscrit dans la durée, ce qui explique en partie le succès continu de Decathlon en innovation frugale adaptée aux besoins des sportifs amateurs.
Autre exemple dans la mode cette fois : la jeune marque Asphalte (vêtements “basics” éco-responsables) a bâti son offre uniquement sur la base de sondages clients. Pour chaque type de vêtement (le jean parfait, le t-shirt idéal, etc.), Asphalte interroge sa communauté sur les coupes, les couleurs, les points douloureux à corriger (ex : les t-shirts qui se déforment). Ce n’est qu’après avoir recueilli des milliers de réponses que la marque lance la production du vêtement en précommande. Cette co-création poussée (alliée à un modèle sans stock) lui a permis de sortir très vite des pièces plébiscitées et d’éviter les invendus. On retrouve là un avantage clef : la co-création évite le gâchis en assurant l’adéquation offre-demande.
Enfin, même les géants du retail high-tech se mettent à l’écoute. Nike par exemple a depuis des années une plateforme Nike ID permettant aux clients de customiser leurs baskets (choix de couleurs, motifs) – une forme de co-création individuelle sur le design du produit. IKEA a lancé en 2018 “Co-create IKEA”, un programme d’open innovation où le public peut soumettre des idées de meubles ou d’accessoires ; certaines idées gagnantes ont été intégrées au catalogue, le contributeur étant mentionné et récompensébraineet.combraineet.com. Starbucks, avant même l’ère du digital, avait innové en co-créant avec sa clientèle des boissons saisonnières et des ambiances de café, via des focus groups et des remontées terrain (sa boisson “Pumpkin Spice Latte” culte est née ainsi). Plus récemment, la chaîne a permis à ses clients de influencer la création de recettes ou d’avantages fidélité via des “co-creation sessions” locales – même si, comme on l’a vu, son grand portail MyStarbucksIdea a fini par s’essouffler.
Dans le retail, la leçon principale est que le client ne demande qu’à s’investir dans ce qu’il consomme. Saisir cette opportunité peut aboutir à des produits exactement calibrés pour trouver leur marché, et à des communautés de marque très engagées. Le tout est de savoir canaliser cette volonté. Les exemples de Decathlon ou Asphalte montrent qu’un processus bien structuré (questionnaire, test, précommande) peut rendre la co-création hautement efficace pour lancer des best-sellers. À l’inverse, Starbucks a montré qu’une co-création trop générale et non pilotée vers l’action peut décevoir.
Intégrer stratégiquement vos clients : conclusion pour les dirigeants
Alors, outil stratégique ou perte de temps ? À la lumière des éléments exposés, la co-création avec les clients apparaît clairement comme un formidable outil stratégique si elle est déployée dans les bonnes conditions. Elle permet de développer des offres en accord avec le marché, plus vite et souvent à moindre coût, tout en renforçant la fidélité des clients impliqués. Pour des dirigeants en quête d’innovation et de différenciation, c’est un levier à considérer sérieusement : les bénéfices mesurés par DHL, LEGO, Decathlon, C’est qui le Patron?! et bien d’autres en témoignent. De plus, la co-création s’inscrit dans une tendance de fond d’un consommateur plus acteur, désireux de participer – ignorer cette attente pourrait devenir un handicap à terme, notamment vis-à-vis des jeunes générations de clients.
Cependant, la co-création n’est pas une fin en soi, et surtout pas une recette miracle universelle. Elle exige un investissement réel (en temps, en expertise, en organisation) et doit être alignée sur une vision stratégique. Mal conçue ou exécutée sans rigueur, elle peut effectivement devenir une distraction coûteuse, diluer les efforts d’innovation et provoquer des déceptions. En ce sens, elle n’est pas la panacée absolue pour toute entreprise ou tout projet. Un dirigeant avisé évaluera donc dans quels domaines la co-création peut apporter le plus de valeur pour son entreprise, et comment la mettre en place graduellement, de manière pilotée. Commencer par un projet pilote bien défini, mesurer les résultats, apprendre et ensuite élargir la démarche semble un chemin prudent et efficace.
En définitive, intégrer ses clients au processus d’innovation, c’est ouvrir son entreprise à l’extérieur, reconnaître que de bonnes idées peuvent venir d’ailleurs et que la création de valeur peut être partagée. C’est une posture managériale agile et humble, en phase avec l’époque actuelle où les écosystèmes priment sur les structures isolées. Pour un dirigeant, savoir co-créer avec ses clients, c’est sans doute ajouter une corde précieuse à son arc stratégique. Comme le résume un expert, « la co-création n’a pas de limite si ce n’est celle de l’imagination et de la volonté des acteurs impliqués »fanvoice.com. En d’autres termes, bien employée, elle peut emmener votre entreprise aussi loin que vous (et vos clients) êtes prêts à l’emmener. Plutôt qu’une perte de temps, elle pourrait bien être un investissement judicieux dans le futur de votre business.
Sources : Les exemples et données cités dans cet article proviennent de diverses études de cas et analyses récentes sur la co-création, notamment des retours d’expérience d’entreprises (Lego, DHL, Starbucks, Decathlon, etc.) et des expertises publiées sur le sujet1min30.combraineet.comnovakashleyblog.wordpress.comintotheminds.comfanvoice.com, offrant un panorama riche des réussites et écueils de la co-création client.